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Histoire de l’anatomie

Le 14 mars 2017
Histoire de l’anatomie

Still, ou pour les non connaisseurs, fondateur de l’Ostéopathie a déterminé la pratique ostéopathique sous trois termes :

  • L’anatomie
  • L’anatomie
  • L’anatomie

En effet, chaque ostéopathe se doit de connaître l’anatomie humaine dans les moindres recoins, base de chaque traitement.

Afin de mettre à l’honneur cette noble discipline, il est intéressant de retracer un parcours de l’anatomie, qui a beaucoup évolué et qui a été à la base de nombreuses polémiques.

Histoire primitive de l’anatomie :


Médecine dans la préhistoire et la protohistoire :


La connaissance élémentaire de l’anatomie animale pour une dissection utilitaire (découpe du gibier, prélèvement des peaux, de certains os, des tendons, des intestins) est ancienne.

Au cours du paléolithique supérieur (-30 000 ans) apparaissent les premières représentations graphiques, surtout animales et parfois humaines (Venus de Lespugue).

C’est un début d’analyse des formes. Il s’établit une ébauche de relation entre l’anatomie et la pathologie. L’archéologie a ainsi mis en évidence la pratique de la trépanation pour les traumatismes ou dans le cadre de rituels, ce qui impose une connaissance anatomique même sommaire du crâne et de son contenu.

Certains auteurs considèrent qu’à cette époque se développent des théories sur le pouvoir et la vertu de certains viscères, et des comportements anthropophages (cœur, foie, cerveau).

 
Époque antique :


En Mésopotamie vers 3500 av. J.-C., le savoir anatomique est au service de l’art divinatoire. L’analyse des viscères d’animaux sacrifiés a des valeurs prédictives très diverses (météo, récoltes, issue d’une bataille…). Le cœur est le siège de l’intelligence, le sang représente la vie, la forme des lobes hépatiques prédit le destin. Le médecin est aussi prêtre et devin.

En Égypte :


La connaissance anatomique est essentielle à la technique d’embaumement, autant qu’à la pratique médico-chirurgicale. Certains papyrus (comme le papyrus Edwin Smith ou le papyrus Ebers, écrits aux alentours du xvie siècle) contiennent les descriptions anatomiques médicales les plus anciennes attestées à ce jour.

L’extraction du cerveau par les fosses nasales nécessite la connaissance de la lame criblée de l’ethmoïde (situé environ dans le haut du nez, entre le front et la racine du nez), les viscères conservés dans les vases canopes sont identifiés. Des notions de formes et topographies viscérales sont rapportées dans des papyrus, avec des erreurs importantes ; par exemple, le cœur est identifié comme le centre des vaisseaux, mais toutes les structures canalaires sont des vaisseaux (artères, veines, voies urinaires, tube digestif…). L’importance donnée à la préservation des cadavres interdit la pratique de dissections « scientifiques »

 

En Grèce antique :


La dissection des défunts est interdite, les observations sont faites sur des animaux.

Les Grecs du ive siècle av. J.-C. (Platon) développent la réflexion, le discours, le raisonnement, mais ne sont pas des scientifiques (exemple de raisonnement : la forme parfaite est la sphère, la tête humaine a globalement une forme de sphère…, c’est ainsi que s’élabore la théorie du microcosme.)

Pour Hippocrate, la santé et la maladie sont matière à penser, à interpréter et raisonner, mais il reste plus dans le domaine de la philosophie que de la science. Hippocrate, contemporain de Platon est un mauvais anatomiste, certes le cœur est le siège de la circulation, mais la physiologie est fausse : « le cerveau est le siège de l’intelligence parce que la tête est sphèrique ».

L’essor anatomique à Alexandrie :


Il se crée le Musée (=centre de recherche) et la bibliothèque. Hérophile (340 av. J.-C.) décrit de nombreuses structures : le cerveau, les méninges, les sinus veineux de la base du crâne, les nerfs crâniens… Érasistrate (320 av. J.-C.) pratique environ 600 dissections, il décrit les valvules du cœur, il distingue les nerfs moteurs des nerfs sensitifs et suppose que l’intelligence est proportionnelle au nombre de circonvolutions cérébrales… Mais l’incendie de la bibliothèque (en 47 av. J.-C.) et la conquête romaine de l’Égypte entraînent un déclin des recherches anatomiques.

 

L’Empire romain :


Galien (130 apr. J.-C.) est plus médecin que chirurgien, il pratique des dissections sur le singe, peut-être sur des gladiateurs ; il décrit : les fonctions des muscles et des articulations, les viscères thoraciques, le tronc cérébral… Mais les dissections humaines seront interdites sous Marc Aurèle, et pendant 10 siècles l’œuvre de Galien sera copiée, sans vérification et sans progrès.

 

L’anatomie au Moyen Âge :


Il n’y a pas de recherche structurée, ni de développement médical et chirurgical. En Andalousie, quelques textes latins et grecs sont transcrits, avec souvent une exégèse accommodée aux contraintes religieuses. À Salerne (ixe siècle) puis à Bologne, Montpellier et Paris, des privilèges sont accordés par l’Église à des confréries, pour des dissections sur des corps de suppliciés, mais on se limite à des commentaires selon Galien, il n’y a pas d’étude anatomique.

À noter cependant l’édit de 1241 promulgué par l’empereur du Saint Empire Fréderic II de Hohenstaufen, autorisant la dissection des cadavres masculins. L’Église s’empressa de révoquer l’édit après la mort de l’empereur.

Ultérieurement des chirurgiens demandent le recours à l’étude par la dissection et non plus le commentaire (Henri de Mondeville, Guy de Chauliac). La permission du duc d’Anjou (en 1376), améliore ces conditions. Mais surtout les papes Sixte IV et Clément VII favorisent et recommandent les dissections pour l’étude médicale.

 

            2. Les bases théoriques


L’anatomie de la Renaissance :


André Vésale, né à Bruxelles le 31 décembre 1514, bouleverse la connaissance anatomique. Il est né dans une famille dont plusieurs générations de médecins se sont succédé à la cour de Bruxelles depuis Charles le Téméraire jusqu’à Charles Quint. Il bénéficie donc d’une tradition familiale qui lui permet d’enfreindre les interdits et les peurs qui règnent dans l’esprit de la plus grande partie de la population au sujet du corps humain et, encore adolescent, il commence à étudier les corps de suppliciés qu’il dérobe au Galgenberg (mont de la potence, où sera édifié, au xixe siècle, le Palais de Justice de Bruxelles) qui domine sa maison (actuelle rue des Minimes), puis étudie à Paris, Padoue, Bâle…
Il décrit l’homme « à partir de l’homme vivant ou qui a vécu », il publie un ouvrage de référence : De humani corporis fabrica illustré de représentations graphiques par Jean Calcar (élève de Titien) ; c’est un recueil d’anatomie descriptive, topographique, fonctionnelle et biomécanique.

Suspecté par l’Inquisition à cause de ses dissections de corps humains — qui vont à l’encontre des interdits religieux des juges (malgré les autorisations de Sixte IV et Clément VII) — il échappe à une condamnation comme hérétique. Il le doit à la position qu’il avait occupée dans sa jeunesse à la cour de Bruxelles, comme médecin de l’empereur Charles Quint. Frappé de la peine d’un pèlerinage à Jérusalem, il va mourir au retour de Palestine, lorsque le navire qui le transporte fait naufrage au large de l’île de Zante sur laquelle il parvient à se réfugier pour y mourir du typhus le 15 octobre 1564.

Parallèlement aux travaux de Vésale, l’école française s’illustre par les recherches :

  • De Charles Estienne qui publie en 1545 De Dissectione partium corporis humani, traduit en français en 1546 sous le titre de La Dissection des parties du Corps humain
  • De Jacques Dubois, dit Jacobus Sylvius, maître puis adversaire de Vésale, qui corrige de nombreuses erreurs
  • D’Ambroise Paré qui écrit en 1561 l’anatomie universelle et établit un rapprochement très bénéfique avec les chirurgiens.

Les écoles italiennes s’illustrent par de nombreux travaux : Gabriele Falloppio à Padoue décrit la trompe utérine et le nerf facial. À Bologne se succèdent : Bérenger Da Carpi, Costanzo Varole, Arantius et Barthélémy Eustache.

Pendant ce xvie siècle, l’imprimerie va faciliter la diffusion, mais surtout la collaboration des artistes avec les anatomistes et le monde médical va rendre très performantes les représentations anatomiques (Léonard de Vinci, Michel Ange, Paul Véronèse).

 

L’anatomie au XVII siècle :


Si au siècle précédent le travail était basé sur l’observation et la dissection, au xviie siècle on passe à l’étude microscopique.

William Harvey (1625) démontre la circulation sanguine. Malpighi découvre les vaisseaux capillaires, Sténon démontre la contraction musculaire cardiaque. C’est le début d’une anatomie physiologique et fonctionnelle.

Aselli découvre la circulation lymphatique, Pecquet, puis Rudbeck et Bartholin démontrent la totalité de cette circulation.

À la fin du xviie siècle, le corps humain fonctionne comme une mécanique organisée et autonome.

Pierre Dionis fut, en France, le diffuseur des thèses de William Harvey, publiant en 1690 L’Anatomie de l’homme suivant la circulation du sang et les dernières découvertes, qui sera le livre de base des chirurgiens jusqu’à la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Pendant le XVIII siècle :


Avec l’Exposition anatomique de la structure du corps humain, publié en 1732, paraît le premier traité scientifique d’anatomie descriptive,

Jacques-Bénigne Winslow est le créateur d’une description du corps humain, non seulement structurale mais aussi fonctionnelle, exposée avec une méthode rigoureuse.
L’anatomophysiologie (relation entre la structure et la fonction) se développe. C’est la naissance de l’anatomie comparée, de l’anthropologie et de la biologie.

La Mettrie en 1748 soutient: « le cerveau sécrète la pensée comme le foie la bile ; les pensées sécrétées s’accumulent de générations en générations… ». C’est l’époque des amphithéâtres de dissection, des galeries d’histoire naturelle (reproduction en cire colorée). Les écoles anatomiques se développent dans toute l’Europe.

L’anatomie au xixe siècle :


C’est la période de l’histologie, la théorie de la cellule est démontrée ; Bichat en 1800 ébauche la science des tissus dans le « traité des membranes ». La publication en 1801 de son Anatomie générale et celle de son Anatomie descriptive couronnent l’œuvre de Bichat, fondateur d’une nouvelle branche de l’anatomie : l’« anatomie générale » s’intéressant non aux organes eux-mêmes mais aux tissus qui les constituent et contribuant ainsi au développement de l’histologie. Le 4 décembre 1803 (12 frimaire An XII) est fondée la Société Anatomique de Paris par Laennec et Dupuytren, Société savante qui crée les bases de l’anatomie pathologique. On étudie le système nerveux, la paléontologie. On élabore une anatomie topographique et chirurgicale pour la sécurité des amputations et les désarticulations, parmi ceux-ci : Béclard, Denonvilliers, Tillaux et Farabeuf. Dans ce même siècle sortent de grands traités d’anatomie comme l’atlas lithographique de J.-M Bourgery en (1830-1848), ou l’ouvrage sur les lymphatiques de Sappey)…

En Italie les travaux portent surtout sur la neuro-anatomie avec : Corti, Pacini, Giacomini, Camillo Golgi. Les anatomistes du xixe siècle ont des origines et des fonctions très variées : médecins, chirurgiens, physiologistes, biologistes, conservateurs de musée, etc.

 

L’anatomie actuelle :


L’anatomie évolue avec les progrès des moyens techniques d’exploration (ex ; l’endoscopie, images in vivo en temps réel, jusqu’aux échelles microscopiques), l’usage des navigateurs, etc.), avec les progrès de la connaissance et avec l’apparition régulière de nouveaux (outils de visualisation scientifique).

Elle tend à évoluer vers une science appliquée, au service de la médecine et de la chirurgie (assistance informatique notamment), de l’industrie des prothèses, mais l’enseignement didactique de l’anatomie se poursuit et évolue, par exemple en utilisant moins la dissection et plus la modélisation 3D pédagogiques. Les images animées peuvent compléter ou remplacer les images fixes des planches anatomiques traditionnelles1,2. L’utilisation des modèles informatiques par le dessin animé et le cinéma (image de synthèse) a aussi bénéficié des progrès de l’anatomie.

L’information anatomique tend aussi à se démocratiser, par exemple avec un outil de visualisation anatomique représentant en 3D les structures, réseaux et organes du corps humain. Cet outil créé par des ingénieurs de Google sur leur temps libre, d’abord nommé « Google Body Browser » a été gratuitement mis à disposition de tous en 2012 (à condition de disposer d’un accès à l’Internet (et idéalement de comprendre l’anglais, car la dénomination des organes s’y fait en anglais).

 

 

Aujourd’hui encore, de nombreuses structures anatomiques et physiologiques portent le nom de grands anatomistes.